On entend beaucoup parler en ce moment du paiement mobile qui gagne petit à petit en popularité. Cette tendance laisse penser que cette technologie pourrait devenir la norme d’ici quelques années. Pourtant, enterrer dès aujourd’hui la fameuse « CB » semble prématurée. En effet, arrivée en France il y a maintenant plus de 50 ans, elle continue à se réinventer afin d’évoluer avec son époque.

Focus sur ce moyen de paiement qui est (très) loin d’avoir dit son dernier mot.

La carte bancaire, un moyen de paiement en croissance depuis plusieurs années …

Parmi les moyens de paiement scripturaux, la carte bancaire (CB) est largement plébiscitée dans la zone euro et continue à gagner en popularité. Elle représente 42% des échanges scripturaux en Europe (en volume) pour l’année 2016 contre 40% environ en 2014.
Cependant, de fortes disparités existent au niveau de son utilisation selon les pays. Le Danemark est le champion d’Europe de l’utilisation de la carte bancaire avec 81% des paiements scripturaux réalisés sous cette forme. L’Allemagne, de son côté, arrive à l’avant dernière place du classement avec seulement 19% des paiements scripturaux réalisés par CB. Cela s’explique en partie par l’ancrage historique des espèces dans ce pays.

Pour ce qui est de la France, le taux d’utilisation de la carte bancaire est l’un des plus élevé d’Europe. Cette tendance tend à s’accélérer grâce à la démocratisation du paiement sans contact, qui après un démarrage laborieux est aujourd’hui plébiscité. Le cap du milliard de transactions (sur une année) a été atteint en novembre 2017 contre environ 600 000 transactions l’année précédente. Par ailleurs, le passage du plafond de paiement de 20€ à 30€ devrait amplifier cette tendance.

… qui joue un rôle important dans la stratégie d’acquisition de clients pour les acteurs du marché  


Du côté des banques en ligne françaises
, la carte bancaire est devenue un élément central dans leur stratégie d’acquisition de nouveaux clients, au même titre que les frais de tenue de compte réduits. Au lieu de payer une centaine d’euros par an pour avoir droit à une carte, l’accès est gratuit dans la majorité des cas chez ces opérateurs, même lorsque l’on souhaite recourir à une Gold. Néanmoins, leurs possesseurs se doivent de justifier d’un revenu minimum et/ou de déposer tout ou partie de leur salaire sur leur compte courant. Dans le cas de Boursorama Banque, l’accès à la carte Visa Premier est gratuit sous réserve d’un revenu net mensuel d’au moins 1 800€. Comparativement, une carte Visa Classic est facturée 45€ et une Visa Premier 135€ à la Société Générale, à quoi il faut ajouter les différents frais de tenue de compte. Pour les différents acteurs du secteur, la carte bancaire joue un rôle d’une importance clé dans leur conquête de nouveaux clients. C’est ce que N26, la célèbre néo-banque berlinoise, a bien compris. Outre son application mobile épurée et ses frais réduits pour les opérations effectuées à l’étranger, son succès repose sur ses cartes bancaires qui sortent de l’ordinaire grâce à leurs designs résolument novateur. C’est le cas par exemple de sa carte bancaire d’entrée de gamme (faisant office de produit d’appel) qui aborde un design tout en transparence, ce qui tranche avec ce que l’on peut voir d’habitude. Dans le même temps, dans l’idée de conquérir une clientèle haut-de-gamme, N26 est en train de déployer une carte pour le moins surprenante. Cette dernière a la particularité de posséder un cœur en métal, la rendant 3 fois plus lourde qu’une carte classique. Bien que l’utilité de cet ajout soit limitée, ce type de carte bancaire a su rencontrer son public.

Une carte bancaire qui évolue avec son temps

Face au paiement mobile, la carte bancaire réussi à se renouveler afin d’apporter toujours plus de sécurité et d’usages à ses utilisateurs.

Malgré une baisse de 4,1% du montant de la fraude à la carte bancaire en 2016, le nombre de cartes bancaires touchées par une opération frauduleuse a cru de manière vertigineuse, augmentant de 31% par rapport à l’année 2015.

Les banques ont bien conscience de ce problème, et travaillent d’arrache-pied afin d’introduire des systèmes de protection toujours plus performants. C’est le cas de la Société Générale qui a lancé en 2017 une carte bancaire équipée d’un code crypto-dynamique, technologie développée par l’entreprise française Idemia. Grâce à l’intégration dans la carte d’une batterie au lithium, le cryptogramme présent au dos de la carte change toutes les heures, réduisant ainsi la possibilité pour les fraudeurs en ligne de se servir d’une carte dont ils auraient subtilisé les informations. Preuve du bien-fondé de cette solution, elle rencontre aujourd’hui un franc succès avec l’émission de 200 000 cartes de ce type en l’espace de quelques mois, soit le meilleur démarrage de l’histoire pour une nouvelle carte chez Société Générale.

L’usage de la biométrie sur les cartes de paiement pourrait également se répandre dans les années à venir. Pour valider une opération, plus besoin d’utiliser son code secret grâce au lecteur d’empreintes intégré. A noter que la société Gemalto (en cours de rachat par Thalès) a lancé il y a quelques mois la première carte à reconnaissance digitale permettant de payer aussi en sans contact.

Mais une des innovations les plus intéressantes concerne l’open payement. Cette technologie est apparue il y a maintenant quelques années et permet entre autres d’utiliser sa carte bancaire comme titre de transport. Pour cela, il suffit simplement de passer sa carte bancaire sur une borne sans contact lorsque l’on accède et que l’on quitte le réseau de transports en commun. Cela permet de définir le trajet effectué par l’usager et de facturer avec précision la distance parcourue. Cette technologie est présente à Londres depuis plusieurs années et arrive petit à petit en France, avec une première application à Dijon depuis le début de l’année.

Ainsi, ce nouveau service offre une multitude de possibilités et pourrait être utilisé, à terme, dans bon nombre d’endroits (parkings, musées, …).

Le paiement mobile, pire ennemi de la carte bancaire « physique » ?

L’arrivé du paiement mobile sans contact (Apple Pay, Carrefour Pay, …) n’a pas encore eu, en France, le succès escompté et son utilisation reste encore marginale. D’après une étude de l’institut FutureThinking menée en 2015, « seuls 7% des répondants déclaraient payer via le sans contact tous les mois depuis leur smartphone ». Les raisons sont multiples mais il est possible de ressortir 2 causes principales :

  • Un avantage encore limité par rapport au paiement NFC (Near Field Communication) par carte bancaire
  • Une appréhension des individus de voir leurs données être piratées

Ainsi, la carte bancaire garde en France une longueur d’avance par rapport aux autres moyens de paiement. Les innovations actuellement en phase d’expérimentation et celles apparues ces dernières années (sans contact, Open Payment, …) offrent encore de beaux jours aux cartes bancaires. Cependant, à terme, il est grandement probable que le paiement mobile devienne la norme en France et dans le monde.