Chapitre 2 : l’épargne

Ces dernières années, la banque traditionnelle a abimé son image de partenaire fiable et incontournable pour épargner. Pendant la crise financière, les épargnants ont appris à leurs dépens que des produits « sans risque”, comme les fonds monétaires dynamiques,  pouvaient subir une forte baisse voire devenir illiquides. De même, certains fonds à formule au capital “garanti”, ont occasionné à leurs détenteurs de sérieuses pertes. Dans le meilleur des cas, les fameuses formules restent complexes et incompréhensibles pour le profane. Leurs frais de gestion sont élevés et opaques et le gain potentiel difficile à appréhender.

Dans le premier billet de notre série FinTechs, nous posions l’hypothèse que ces dernières menacent les banques de détail traditionnelles sur leurs trois métiers de bases : le crédit, la collecte, la gestion des flux. Après avoir illustré ce phénomène sur le crédit, nous verrons dans cette 2e livraison que les FinTechs apportent aussi de nouvelles solutions d’épargne aux particuliers.

Faciliter les comportements d’épargne

Les FinTechs proposent des fonctionnalités qui facilitent le comportement d’épargne par la maîtrise de son budget personnel. Les applications de personal finance management (PFM) comme Bankin ou Linxo permettent à l’utilisateur de disposer d’une vue consolidée de l’ensemble de ses avoirs et de ses flux financiers, de connaître la ventilation de ses dépenses et d’identifier ainsi sa capacité d’épargne mensuelle moyenne en vue de financer ses projets. Mint, acteur historique du PFM online lancé en 2006, prolonge ces fonctionnalités en proposant un simulateur qui permet de comparer l’offre d’épargne d’une dizaine de banques.

La nouvelle version de l’application Moven va plus loin car elle introduit un aperçu en temps réel afin d’encourager l’épargne et de décourager les achats d’impulsion. Dans une approche comportementale, ludique et visuelle, elle permet à l’utilisateur de reprendre le contrôle de ses comportements d’épargne et d’achat.

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Rendre l’épargne plus transparente

Les FinTechs apportent aussi une réponse à l’opacité de beaucoup de placements financiers en mettant en relation directe l’épargnant et l’emprunteur. Pour financer PME et TPE, les acteurs du crowdlending ont besoin de collecter des ressources auprès d’épargnants et de leur offrir une rémunération proportionnelle au profil de risque de l’emprunteur. L’épargnant sait donc ce que son argent finance, il peut choisir de privilégier un projet en fonction de ses affinités et il obtient une rémunération faciale supérieure à celles des produits d’épargne classiques.

Bien sûr, ce placement est risqué. Le crowdlending étant un phénomène récent, l’historique de rendement moyen de Lendix, tenant compte des défauts des entreprises financées, est vierge. Néanmoins, au fur et à mesure, cette historique va s’alimenter et permettre d’anticiper le rendement à terme de son placement. L’épargnant pourra aussi choisir entre les plateformes de crowdlending sur la base du rendement moyen de leur portefeuille, fruit de la performance de leurs outils de scoring.

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Sur l’activité moins risquée du crédit entre particuliers, le leader français Prêt d’Union (200 millions d’euros de crédits octroyés en un peu plus de 3 ans) dispose aujourd’hui d’un historique détaillé des volumes octroyés, des remboursement et des retards de paiement permettant à l’investisseur particulier de choisir en connaissance de cause entre les différents fonds proposés.

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Démocratiser les placements financiers

S’il n’est pas éligible à la gestion de privée ou à la gestion de fortune, le client particulier dispose d’une offre réduite de la part de sa banque : épargne liquide, épargne réglementée, assurance-vie en euros, fonds à formule maison… De quoi satisfaire les objectifs de sa banque en termes de ratio  de liquidité ou de commissionnement, mais rien qui lui permette vraiment de dynamiser son épargne sur le long terme.

Dans ce contexte, des FinTechs comme Wealthfront ou Betterment ont démocratisé aux États-Unis l’accès aux supports les plus performants en développant pour leurs clients des « robo-advisors » : il s’agit d’un service de gestion de patrimoine en ligne, fournissant des conseils de gestion de portefeuille basés sur des algorithmes automatisés, sans intervention humaine.

En France, des acteurs comme FundShop, Marie Quantier ou Yomoni se lancent et proposent une gestion automatisée de comptes titres ou de contrats d’assurance-vie en unités de compte. Ces acteurs mettent en avant leur expertise, leur approche technologique et orientée utilisateur ainsi qu’une une tarification réduite et transparente. Le client renseigne son projet, son profil de risque et la perte maximale qu’il est prêt à supporter : la plateforme définit et gère une allocation d’actifs correspondant aux données saisies.

À ce jour, on ne dispose d’aucun recul sur la performance à long terme de ces conseillers automatisés. La réactivité dans les périodes de volatilité ou de crise sera évidemment primordiale pour créer de la confiance auprès de la clientèle cible. Réponse après la prochaine tempête financière !

Quelles réactions des banques ?

Face à la menace, les banques ne restent pas inertes. Si les applications de personal finance management sont encore rares (Mon budget de Boursorama), on note le développement d’applications d’épargne d’impulsion dans les banques de réseau (Rapid’Epargne des Banques Populaires, CA Store). Investir dans les FinTechs est une stratégie complémentaire, comme le montre l’investissement du Crédit Mutuel dans Yomoni ou Prêt d’Union. En revanche, sur le plan de la performance et de la transparence des produits proposés à leurs clients, les réseaux traditionnels ont encore des marges de progrès importantes.