Au cours des 20 prochaines années, 50% des actifs gérés par les Banques Privées seront transmis à la génération Y aux caractéristiques bien connues : impatience, individualisme, connectivité… S’ajoute à cela la crise financière de 2008, de nouvelles réglementations, la digitalisation, l’évolution du profil des clients : autant d’éléments qui posent un challenge de rétention et d’acquisition du client pour ces institutions. Aujourd’hui, l’environnement dans lequel évoluent les Banques Privées se réforme. Comment réagissent-elles pour rester pérennes ?

Crise & Réglementation : évolution du métier

Alors que l’incitation première à confier ses fonds à une Banque Privée a toujours été de bénéficier d’une rentabilité élevée des placements, aujourd’hui, c’est la recherche d’une qualité de service personnalisée et de conseils patrimoniaux et fiscaux qui prime.

En effet, l’augmentation de la fiscalité a compliqué et incité à l’optimisation fiscale. En résulte une baisse du seuil des revenus des clients potentiels de la Banque Privée, qui privilégient la sollicitation de conseils et délaissent le placement d’actifs. La pression réglementaire prive aussi les Banques Privées d’une partie de leurs profits annuels : d’après le cabinet McKinsey, l’ensemble de la réglementation MiFiD va faire baisser de 13% le profit annuel des Banques Privées européennes. Notamment avec l’entrée en vigueur de la réglementation MIF 2 interdisant les rétrocessions qui va entraîner la nécessité de se transformer, de repenser le modèle économique et l’offre de service.

Ainsi, afin de palier à ces nouveaux comportements, la Banque Privée Swisslife a pris la première l’initiative de facturer ses conseils patrimoniaux jusqu’ici gratuits. Une démarche disruptive dans le secteur, mais qui tend à se répandre. Désormais, le conseil patrimonial s’instaure en prestation payante.

De plus, pour résister à ces pressions réglementaires et aux effets de la crise, d’autres font le choix surprenant de la fusion-acquisition : c’est le cas des banques Martin Maurel et Edmond de Rothschild qui ont annoncé début juin leur intention de se rapprocher. Le résultat de cette union ? Une nouvelle entité de 17 milliards d’actifs sous gestion issus de l’activité de Banque Privée (7 milliards proviennent de Rothschild et 10 milliards de Martin Maurel). Le seuil de rentabilité d’une Banque Privée estimé à 10 milliards d’actifs sous gestion, on comprend la pertinence de cette fusion.

Une société qui se digitalise

Si les FinTech sont déjà une menace avérée pour la banque de détail, elles tendent aussi à le devenir pour la Banque Privée. À défaut d’avoir une connaissance historique du cœur de métier, les FinTech peuvent s’appuyer sur un ensemble de technologies SMAC (Social, Mobile, Analytic, Cloud) qui peuvent augmenter la rentabilité des activités traditionnelles de la banque.

Certaines FinTech proposent ainsi des « Robot-Advisor » qui, grâce à un algorithme croisant les données du marché et les informations du client, prodiguent un conseil financier ultra-personnalisé. Ajoutez à cela des frais de gestion bien moins élevés que ceux d’une banque privée classique et vous obtenez une réelle concurrence, voire menace. Pour suivre cette tendance et maintenir une intensité concurrentielle, on assiste en parallèle au lancement de la part de certaines Banques Privées de leur propre « Robot-Advisor ». Car rester compétitif est un challenge dans un contexte où le courtage en ligne se démocratise, et accentue la pression concurrentielle notamment sur le montant des frais de gestion – forcément moins élevés pour les pure-players.

Les comportements clients évoluent également. Le Financial Times annonçait récemment que 70% des millionnaires européens de moins de 40 ans consultent souvent leurs portefeuilles à distance – 96% en Chine et 74% aux États-Unis. La finance connectée s’inscrit aussi dans le quotidien des grandes fortunes.

Or, en 2015 moins de 50% des Banques Privées avaient un site mobile, et 28% n’étaient absolument pas présentes dans l’internet mobile. Pourtant, conquérir cette clientèle en ligne estimée à 42 millions générerait 66 milliards de dollars de revenus aux Banques Privées .

En conclusion, si pour les banques de détail la transformation – notamment digitale – relève de la survie, il est vrai qu’elle s’apparente plus à une prise de position et d’anticipation stratégique pour les Banques Privées. Pour autant, sans être absolument nécessaires, les retombées des transformations des Banques Privées dans un contexte actuel relativement compliqué sont positives à la fois en termes d’image et de performance.