La COP21 – qui se tient à Paris jusqu’au 11 décembre – représente une opportunité historique d’aborder l’ensemble des outils dont nous disposons afin d’assurer la transition énergétique. Au cours des mois précédents l’ouverture de cette conférence climatique mondiale, le recours aux « obligations vertes » s’est multiplié. Quels sont les acteurs qui structurent la distribution de ces produits ? La croissance de ce marché est-elle durable ?

Les Green Bonds, un marché en plein essor

Les Green Bonds sont des  « dettes » émises sur le marché obligataire afin de financer des projets aux effets environnementaux et/ou sociaux positifs. La différence fondamentale qu’il existe entre obligation « verte » et obligation « traditionnelle » repose donc exclusivement sur la destination finale des investissements.

Ce marché devient aujourd’hui de plus en plus liquide – donc fiable – grâce à l’augmentation du nombre et de l’envergure des opérations financières qui s’y réalisent. Représentant 4,5 milliards d’euros en 2012, il atteindrait potentiellement plus de 100 milliards d’euros en 2016. Ces instruments financiers pourraient contribuer à soutenir en partie la transition énergétique, à condition d’en faire un mode de financement solide et pérenne sur l’aspect environnemental et sociétal.

Deux facteurs principaux expliquent l’essor de ce marché : l’émission d’obligations vertes est d’abord, pour les émetteurs, un moyen d’attirer les investisseurs dits « responsables », identifiés comme une cible en fort développement. De plus, ces derniers étant soumis à la nécessité de respecter des critères environnementaux plus contraignants, la demande s’intensifie. En effet, selon une étude du cabinet McKinsey, les besoins d’investissements afin de réduire le niveau des émissions de CO2 à l’échelle mondiale d’ici 2030 s’élèvent à 18 000 milliards d’euros. En ce sens, le volume d’émission de Green Bonds est révélateur avec un taux de croissance annuel moyen supérieur à 40% depuis 2007.

Une multiplicité d’acteurs et des projets variés

Les banques de développement sont les leaders incontestés de l’émission d’ « obligations vertes » : depuis leur introduction en 2007, elles souscrivent ces titres pour financer les projets de développement des énergies renouvelables et de lutte contre le changement climatique. Il s’agit d’ailleurs des objectifs du Climate Awareness Bonds (CABs), émis par la Banque européenne d’investissement dans le cadre de la « Politique de l’énergie pour l’Europe » (programme de la Commission européenne).

De nouveaux acteurs viennent cependant concurrencer ces institutions, qui n’émettent plus que 38% des Green Bonds en 2015, contre 50% en 2014. Les plus grandes percées de ce marché sont celles des collectivités locales et des banques commerciales, qui émettent chacune 15% des « obligations vertes » (contre respectivement 9% et 6% en 2014). En 2014, l’émission d’un Green Bond d’une valeur de 600 millions d’euros a notamment permis à la région Île-de-France de financer la construction et rénovation d’immeubles, ainsi que la création de nouvelles pistes cyclables. De son côté, BPCE a émis le 2 décembre dernier une « obligation verte » pour un montant de 300 millions d’euros. Celle-ci permettra de financer des projets «verts» en relation avec le développement des énergies renouvelables. Le montant de la souscription finale est estimé à plus de 1,2 milliard d’euros, soit une centaine d’investisseurs. Enfin, les grandes entreprises cherchent également à accéder à ce marché : comme précisé dans l’article Bankobserver « COP 21 : découvrez les transformations déjà initiées par les banques françaises », la récente émission d’une « obligation verte » de 2,5 milliards d’euros va par exemple permettre au groupe ENGIE de financer de nouveaux projets environnementaux, tels que l’installation d’éoliennes au Brésil et au Canada.

Des enjeux à relever pour assurer la pérennité du marché

Aujourd’hui, le pvisuel-mobilitérocessus associé à la distribution des « obligations vertes » se structure de la manière suivante : avant même l’évaluation et la sélection des projets, les émetteurs se soumettent à une analyse de leur performance en termes de responsabilité sociale et environnementale (RSE). La portée environnementale et sociale de chacun des projets est ensuite étudiée, et la sélection s’effectue au regard des catégories de critères suivantes : RSE, responsabilité économique et gouvernance. Afin de clarifier cette démarche, des initiatives de notation ESG (Environnementaux, Sociaux, de Gouvernance) voient le jour, telles que les Green Bond Principles. Ces principes déterminent une liste d’activités éligibles au statut d’ « obligation verte », et offrent un cadre aux émetteurs en leur recommandant fortement de répondre à une forme de « cahier des charges ». Cependant, les pratiques sont multiples et rien n’empêche une entreprise n’intégrant pas les critères ESG au cœur de sa stratégie d’émettre un Green Bond. Pour pallier au risque de greenwashing, il est primordial de renforcer la méthode d’évaluation afin de définir ce qui est « vert » et ce qui ne l’est pas. Par ailleurs, les entreprises n’ont pas toutes déployées les outils de reporting suffisants pour mesurer les impacts des « obligations vertes » et attester la traçabilité des investissements. Les émetteurs doivent donc apporter des garanties supplémentaires de façon à prouver que les investissements répondent réellement à des objectifs environnementaux et sociaux.

Sur ce marché en pleine expansion où les règles du jeu ne sont pas encore claires, la question de la « crédibilité » des émetteurs des Green Bonds est essentielle. Face à la volonté de diversifier les sources de financement et d’attirer de nouveaux investisseurs, une clarification des critères d’éligibilité associés aux  « obligations vertes » est nécessaire pour installer durablement la croissance de ces instruments financiers.