La France peut être fière de ses 4 asset managers faisant partie du top 20 mondial. Elle compte 11 000 fonds d’investissements gérés par plus de 630 sociétés de gestion d’actifs et 50% d’entre elles distribuent leurs produits à l’étranger.  La vitesse à laquelle le secteur se développe est également impressionnante avec 200 sociétés de gestion d’actifs créées ces cinq dernières années.

L’Hexagone propose une régulation novatrice combinant protection des investisseurs et développement de l’industrie de l’Asset Management [1]. Il accentue son focus sur la gestion des conflits d’intérêts, la gestion du risque ; par ailleurs, le haut taux d’épargne et la neutralité fiscale au niveau du fonds font de lui une destination attractive pour les investisseurs. Une attractivité qui est de plus satisfaite par de robustes canaux de distribution des produits financiers, de quoi renforcer le dialogue déjà existant entre les entreprises cotées en bourse et les gestionnaires de fonds. A lui tout seul, le secteur de l’asset management capitalise pas moins de 3 800 milliard d’euros d’encours dont 1 800 milliard sont entièrement français ! Cette capitalisation ne fait qu’augmenter depuis deux décennies avoisinant une croissance annuelle moyenne d’environ 4,45% [2,3] et se compose pour 70% par des Fonds d’Investissement Alternatif contre 30% en Organismes de Placement Collectif à Valeurs Mobilières ou UCITS.

 

“Tout le monde peut innover, si sa vie en dépend.” – Akio Morita, cofondateur de Sony

 

La place et les enjeux de l’innovation en asset management

D’après le Larousse, l’innovation tire son origine du latin innovare et veut dire « Introduire quelque chose de nouveau pour remplacer quelque chose d’ancien dans un domaine quelconque ». Aussi, comme le cite si bien Edmund Burke « Innover n’est pas réformer » voilà de quoi poser les bases pour la suite de cette lecture. Avec une telle définition difficile donc de parler d’innovation lorsqu’il s’agit de textes réglementaires, et il semble que les gestionnaires de fonds l’aient bien compris.

En Asset Management, l’innovation est un améliorateur des process et des systèmes en interne. De nombreux fonds allouent une part importante de leur budget à l’innovation et à son implémentation qui ne débouche malheureusement pas toujours sur des mises en application pratiques et rapides. Pourtant, certaines technologies entendent radicalement casser les codes du milieu, c’est le cas notamment de la Blockchain qui manifeste un potentiel titanesque sur plusieurs champs comme ceux de la distribution de fonds et le suivi de l’actionnariat.

La Blockchain au service de l’asset management

Une fois implémentée, la blockchain sert à restructurer la gestion des portefeuilles, accélérer la compensation et le règlement, et d’autre part, faciliter la mise en œuvre des régulations associées à la lutte contre le blanchissement d’argent et à l’obligation de connaître son client (KYC).

Pari pris par Natixis AM via sa plate-forme FundsDLT qui utilise la blockchain dans la distribution de fonds avec pour objectif de réduire le nombre d’intermédiaires et par extension réduire les coûts de fonctionnement. L’ordre d’achat donné par l’investisseur est simultanément, et de façon quasi instantanée, souscrit, passé en compensation, en règlement, puis les fonds transférés. Les activités du fonds se pilotent en temps réel et, par extension, contribuent à augmenter la qualité de l’expérience client. De la même façon, l’ensemble des processus sur les chaînes « chain », courtes ou longues, en interne à la société de gestion ou ceux incluant plusieurs acteurs en externe, peuvent être interconnectés (ou agglomérés « block ») grâce à la technologie blockchain. Cette technologie a donc toute sa pertinence dans la gestion de fonds et remplace aisément de vieux processus manuels dont la lenteur n’était provoquée que par la circulation frictionnelle de l’information d’un acteur à un autre.

Au même titre, la blockchain s’avère utile pour suivre l’actionnariat et les souscriptions sans passer par un administrateur de fonds. C’est ce qu’a su mettre en pratique LendingRobot [7], développant ainsi le premier véhicule d’investissement basé sur la technologie blockchain avec pour objectif de créer des fonds robots de prêts alternatifs. Subséquemment, des commissions plus basses que les hedge funds traditionnels et des investisseurs qui peuvent se retirer du capital en deux semaines seulement !

Bien que la Blockchain ne couvre pas l’entièreté des régulations liées à l’asset management, elle en facilite l’application d’un certain nombre. Sur le même modèle que les livres de comptes comptables, la blockchain permet la mise à jour instantanée de la base de données sans nécessiter d’intermédiaires. Barclays, Santander, Citi, Visa, Nasdaq… autant d’acteurs financiers qui ont choisi au cours de l’année 2016 de franchir le pas ! Ils ont rapidement saisi les enjeux de la blockchain et se sont lancés dans une course à l’armement effrénée à grand coup d’acquisition de start-ups travaillant sur des applications bancaires. Oui, mais pas seulement ! La capacité de la technologie blockchain attire de plus en plus d’industriels pour qui le contrôle de l’origine des matières premières ou des biens est clef. Un investissement juteux pour ces grands acteurs des services financiers qui après avoir fait contribuer les start-ups en interne peuvent très bien céder leurs parts à d’autres tout aussi intéressés…

Blockchain, oui mais alors attention ! Si avoir une base de données accessible à tous et décentralisée est une force et permet de se dispenser de frais d’administration et d’infrastructures, c’est aussi paradoxalement une faiblesse. Le risque de manipulation des chaînes existe. Une partie prenante a la capacité de créer une fourche, privilégiant une chaîne de blocs plutôt qu’une autre avec l’intention d’éclipser certaines informations comme, par exemple, un montant…

Pas infaillible, la Blockchain a malgré tout sa place en asset management

Si aujourd’hui la technologie blockchain reste très largement inexploitée par les 630 sociétés de gestion d’actifs présentes en France, elle possède un potentiel important pour réaliser des restructurations dans la gestion des portefeuilles, accélérer la compensation, faciliter la mise en œuvre des régulations et améliorer l’expérience client. En pratique le scénario est peu probable, mais la blockchain présente un risque lié à la manipulation des chaînes. Elle est un élément important en asset management dans la mise en œuvre d’améliorations de la gestion des fonds et est vouée à se développer drastiquement à l’avenir.